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Force est de constater que le vin, bien avant la bière, a toujours été mis à l’honneur dans la Littérature.
Chargé de symbolisme, il a eu, dès la Grèce antique, droit, lui, à un dieu, Dionysos (Bacchus pour les romains), et est devenu, avec l’avènement de la chrétienté, sang du christ, symbole du sacrifice absolu et de miséricorde.
Le vin aura fait partie des plus truculentes agapes rabelaisiennes, et Baudelaire, au XIXème siècle, le plaçait, dans Les paradis artificiels, avec le haschich, dans les sources d’inspiration privilégiées du poète.
Boisson du peuple, de l’ouvrier comme du paysan, le vin a acquis progressivement des lettres de noblesse contre lesquelles il semblait bien difficile de rivaliser.
Pourtant, tout aurait pu être, dès le commencement, très différent : Dionysos, dieu du vin, boisson des couches aisées, n’est que la substitution tardive de Dionysos dieu de la bière, sous l’antiquité boisson des couches populaires, plus communément appelé Sabazios, représenté par un cheval ou un centaure.
C’est tout un paysage littéraire et symbolique que nous avons donc, grâce à Une Petite Mousse, la possibilité de revisiter, afin de montrer que la bière, loin du traditionnel demi qui perd tout son attrait passée la première gorgée, comme nous le dit Philippe Delerm dans « La première gorgée de bière et autres plaisirs minuscules », est capable, par l’immense multiplicité des brassins répandus dans le monde entier, de nous faire rêver, voyager, méditer aussi, sur notre condition d’Hommes, au même titre que les plus grands crus viticoles.
Et quelle bière de mieux, pour commencer, que le coup de cœur du mois de Une Petite Mousse, à savoir la Boris Goudenov, un Imperial Stout brassé artisanalement et amoureusement par la Brasserie Corrézienne !
Si à l’origine, les Imperial Stouts étaient brassés en Angleterre avec les meilleurs malts du Royaume-Uni pour fournir la cour du tsar de Russie, cette bière si royale dans son essence a paradoxalement évoqué en moi la nature la plus brute, cette époque où les hommes savaient vivre harmonieusement avec elle.
Pour accompagner cette bière extraordinaire, je vous conseille le magnifique roman Estonien de Andrus Kivirähk, L’homme qui savait la langue des serpents, publié aux éditions Attila. Le roman du dernier homme qui parlait la langue des serpents, de sa sœur qui tomba amoureuse d’un ours, de sa mère qui savait faire rôtir comme personne les élans, et d’australopithèques qui élevaient des poux géants.
Tous, en quête de la mythique Salamandre, qui, seule, saura rétablir la force des traditions de ces derniers habitants de la forêt, contre la modernité galopante du village, de plus en plus proche, où s’installent désormais les hommes.
Les arômes puissants de cuir et de malts torréfiés m’ont, immédiatement et bien loin de la cour des tsars, transportés au coin d’un feu réconfortant, où il faisait bon entendre des sages nous parler des temps anciens, de ces jours où la grande Salamandre survolait, bienveillante, la forêt et les hommes, et où ces derniers savaient qu’ils n’étaient rien que les égaux de ces être que nous osons appeler, désormais, des animaux.
Une bière bouleversante, tout simplement, à accompagner donc, comme il se doit, ou plutôt, comme il se devrait, d’une belle tranche d’élan rôti à point.
Un coup de cœur d’Une Petite Mousse vraiment très mérité !
Lionel associe une bière avec un livre sur le coffret dégustation des meilleures bières de décembre. Alors selon vous, quel livre accompagnerait au mieux votre dégustation de la Boris Goudenov ?
Fondateur du Webzine Littéraire Collaboratif « L’Ivre de Lire » et de l’Agence Editoriale Web « Ecritoriales.com », Lionel Clément est, au grand dam de ses géniteurs, tombé dans un brassin étant enfant. Heureusement pour lui, il ne s’en est jamais complètement remis !
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