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Où sont les femmes ? Patrick Juvet se posait déjà la question de façon un peu ringarde (voire sexiste) en 1977. Réponse : elles sont (notamment) au sein de la Pink Boots Society !
Le terme de “brasseuse” n’est pas encore tout à fait ancré dans les mentalités, que beaucoup sont convaincus qu’il faut être un homme avec des gros biscottos pour porter des kilos de malt à longueur de journée et tourner vigoureusement le fourquet dans l’épais brassin… Pourtant, nous avons déjà vu que la bière était une histoire de femmes et ce depuis la nuit des temps !
Aujourd’hui, on tenait donc à mettre en lumière cette initiative de femmes (brasseuses ou non) qui sont incontournables dans le mouvement craft aujourd’hui. Ou pourquoi il est grand temps de conjuguer le métier de brasseur ou de zythologue au féminin 😉
L'initiative Pink Boots Society, qu'est-ce que c'est ?
Pour cela, rien de mieux que de vous présenter la Pink Boots Society, fondée en 2007 par Teri Fahrendor (une brasseuse implantée dans l’Oregon). Une organisation à but non lucratif qui “soutient, inspire, aide et encourage les femmes dans le milieu brassicole” implanté partout à travers le monde.
Organisée en “chapter” (à la manière des grands clubs de moto par exemple), la PBS est présente majoritairement en Amérique du Nord, avec quelques timides incursions en Europe, en Océanie et en Amérique du Sud. En Europe, vous trouverez des chapter Pink Boots en Espagne, en France et aux Pays-Bas.
Le but de cette association est bien entendu la création d’une force et d’une synergie féminine face au milieu essentiellement masculin, mais aussi et surtout un groupement d’entraide via un réseau, permettant de mettre en valeur le travail des femmes dans la bière et le reste, via leur savoir-faire et leur expertise, et ce, dans le monde entier !
The Beer Lantern - 10/03/20
Leur principal fait d’armes (outre le soutien significatif apporté tout au long de l’année) est l’organisation annuel d’un brassin collaboratif mondial. Les membres de l’association se réunissent pour créer avec Yakim Chief Hops un houblon qui sera proposé à la vente et utilisé dans une bière brassée partout dans le monde autour du 8 mars.
Cette opération de communication sert à mettre en lumière le travail de fond de l’asso et de lever des fonds. Avec comme ambition d’aider, de soutenir, d’inspirer et d’encourager les femmes du milieu brassicole, la PBS met l’accent sur l’éducation.
Des bourses sont mises en place et financées par l’association, pour permettre aux femmes et minorités de genre de suivre des cursus ou renforcer leurs connaissances dans la bière.
- financement des frais d’inscriptions à des études de brasseuse
- proposition privilégiée de stage dans des brasseries internationales (de 1 mois à 1 an)
- aide à la préparation du concours de biérologie Cicerone
- accès à des bases d’outils marketing ou business pour monter sa brasserie
- places dans des workshop ou des formations autour de la chimie de la bière
Complétés par des conférences et un vrai réseau d’entraide (primordiale quand on voit les ravages du sexisme dans la bière, qui a eu aussi on #metoo hélas en 2021), il s’agit là d’un vrai outil d’émancipation financière pour celles qui se voient freinées dans leur volonté de travailler dans la bière.
Les brasseuses ont rendez-vous le 8 mars avec la Pink Boots Society
Bien qu’organisée en factions autonomes, cela n’empêche pas l’organisation aux bottes roses de faire parler d’elle plus largement ! Leur fait d’oeuvre le plus notable est le Annual Pink Boots Collaboration Brew Day qui a lieu chaque année le 8 mars à l’occasion de la Journée Internationale des Droits des Femmes.
L’idée est de brasser, le même jour, aux quatre coins de la planète, une bière d’inspiration commune. Pour chaque pound de houblon vendu, Yakima reverse 3$ à l’association Pink Boots Society.
Le 5th houblon Pink Boot (choisi en 2021 pour le brassage de début 2022) a pour profil aromatique les agrumes, le chewing-gum, le pin et les fruits tropicaux. Voici les différents assemblages de houblon proposés depuis le lancement de l’initiative :
- 2021 : HBC 630, Idaho Gem®, Loral®, Talus®, Triumph
- 2020 : Ahtanum®, Cashmere, Citra®, Loral®, Sabro®
- 2019 : Azacca®, El Dorado®, Idaho Gem®, Loral®
- 2018 : Glacier, Loral®, Mosaic®, Sabro®, Simcoe
La première édition française a donc été accueillie par O’Clock Brewing en 2019, grâce l’initiative de Garlonn Kergourlay (consultante indépendante), Dorothée Van Agt (caviste, zythologue et brasseuse) et Mélanie Antier (responsable commerciale chez O’Clock). Le brassage a réuni une vingtaine de femmes professionnelles de la bière de la France entière et donné naissance à une savoureuse NEIPA, la « It’s Pink O’Clock ».
En France en 2020, il fallait se tourner du côté de Bordeaux avec la Microbrasserie Béglaise. Cette brasserie artisanale fondée par l’artiste Alê Kali organisait le brassin participatif en Nouvelle-Aquitaine avec 12 brasseuses pro au rendez-vous.
Tous les évènements Pink Boots Society 2022 sont recensés sur cette carte interactive. En France, on note déjà des brassages de Toulouse à Dinan en passant par Valence, Montpellier, Mâcon, Agen et Lille. Vous pourrez suivre les brassins sur les réseaux grâce aux hashtags #pinkbootssociety #collabbrewday et #pinkbootsbrew. Et si l’aventure vous tente, voici le processus de participation !
Les femmes qui font la bière en France
Nous voulions profiter de l’occasion de cet article pour vous parler également de femmes importantes dans le monde brassicole français, si d’aventure vous ne les connaissiez pas déjà ! Elles n’évoluent pas directement au sein de la PBS, mais leur travail oeuvre de concert pour mieux faire connaître les femmes dans la bière.
ELISABETH PIERRE DE BIERISSIMA
Évidemment, son nom se retrouve facilement sur toutes les lèvres. Celle que l’on surnomme papesse de la bière multiplie les actions et les casquettes autour de la bière. Beaucoup la connaisse surtout en temps que rédactrice du célèbre Guide Hachette des Bières, mais la fille de l’orge (comme elle s’appelle) est également à la tête d’un blog, d’un podcast, d’un magazine autour des accords bières et mets…
Sans oublier qu’elle a également rédigé plusieurs livres, dispense régulièrement des formations, intervient comme juge dans nombre d’évènement et a même co-construit un verre spécialement dédié à la bière ! Elle a créé le Cercle Bierissima pour rassembler et mettre en lien les femmes du milieu de la fermentation : l’on parle ici de bière donc, mais aussi de fromage, de boulangerie…
CAROL-ANN DE HOPPY HOURS
Carol-Ann est une femme qui compte dans la biérosphère française. Sur Hoppy Hours, son blog “sur la bière avec une petite touche de féminisme, parfois“, elle publie des articles approfondis allant de l’organisation d’une dégustation de bière à des réflexions sur la notion de produit de terroir. Carol-Ann est aussi la co-fondatrice de BrewJob un moteur de recherche dédié aux emplois de la filière brassicole (évidemment).
Sur son blog, elle liste notamment dans un article très pertinent 25 femmes qui font la bière en France : on y retrouve entre autres les brasseuses des brasseries Merlin, Effet Papillon, 5 bis, Vestibule (pour ne citer qu’elles). Carol-Ann met également en avant des cavistes, juges et biérologues françaises renommées, sans oublier Aurelie Trichet & Carine Wirth du podcast Comment brasser sa bière.
FANNY MADRID & LUCIE BOUTEILLER DE HOPEN
Sans houblon, point de bière : on tenait donc à parler des deux femmes à l’origine de HOPEN – Terre de Houblon. Dans la vague des néo-houblonniers, Fanny et Lucie se sont affirmées comme fer de lance du mouvement dans la région Aquitaine. Le duo encourage les agriculteurs à intégrer du houblon à leur production pour fournir les brasseurs artisanaux, et accompagne toute personne en parcours de reconversion qui sont à démarrer une houblonnière.
Alors, après tout ceci, QUI considère encore que bière est forcément synonyme de testostérone ?! Chez Une Petite Mousse, nous sommes admiratifs de tous ces chemins de traverse, ces initiatives innovantes et cette sororité indéfectible que les femmes du 21ème siècle ont su mettre en place pour toujours mieux valoriser la bière artisanale. En espérant que les choses continuent d’évoluer dans le bon sens !
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